Sae Nishijima - Terminée

Oh, salut toi ! Ne sois pas timide, présente-toi ! Comment t'appelles-tu ? Quel âge as-tu ? Comment te surnomme-t-on ? Allez jeune ami(e), éclaire ma lanterne. ●

Se faisant interpeller de la sorte, en plein milieu de la rue, Sae se retourna vers le vieil homme, la tête haute. Seuls ses yeux hautains se baissèrent légèrement pour voir que son interlocuteur tenait entre ses mains une caméra. Elle ne payait pas de mine, ça ne risquait pas d’être la télé. Mais néanmoins, se faire filmer à l’instant présent par un inconnu la dérangeait quelque peu. On ne savait jamais sur qui ou quoi tomber. Un mouvement de tête et deux gorilles, costard noir et lunettes de soleil, agrippèrent le vieux par les épaules et le trainèrent dans une ruelle sombre un peu plus loin, suivis de près par la jeune femme. Les deux mastodontes lâchèrent l’homme et se mirent chacun d’un côté de la rue, afin d’empêcher la plèbe de passer par là et de déranger la jeune maitresse. Sur les rotules, le pauvre homme vit Sae se planter devant lui, droite, les mains sur les hanches, avant qu’elle ne se penche sur lui et qu’elle lui colle l’avant de sa basket gauche dans le creux de l’estomac.

Nan. Toi t’es qui ? Tu te crois où avec ta caméra en train de filmer des jeunes filles, sale pervers ! Sae Nishijima, 17 ans, va se faire un plaisir de te faire passer le gout de la chair fraîche. Tu voulais que j’éclaire ta lanterne, tu vas voir des étoiles, j’te garantis. Ouais Nishijima, t’as bien entendu. Tu sais, la famille mafieuse qui chapote un peu tout par ici depuis quelques générations. T’as compris dans quelle merde tu es?
… Beuh… ça a pas l’air de te faire flipper plus que ça… Ce vieux shnock… grinça t-elle entre ses dents. Bah, au moins si tu nous crains pas, tu dois forcément nous connaître ou avoir entendu parler de nous. Non ?

Elle soupira longuement. Elle libera l’homme de son étreinte pédestre et se redressa en croisant les bras, visiblement courroucée.  

Bah, maintenant qu’on est plus intime, crache ton venin. T’avais l’air tout excité à poser tes questions, j’veux bien t’accorder de mon temps. Mais au moindre truc suspect, mes deux bonhommes te scalpent. Capiche ?


Et alors, qu'est-ce que tu fais dans la vie ? Quels sont tes hobbies, tes passions ? ●

Baaaaaaaka, dit elle d’un ton vulgairement vulgaire. Ça ne se voit pas à ma tenue ? J’suis lycéenne coco. En plus d’être vieux t’es carrément miro. C’est pas beau de vieillir. C’est pas pour ça que tu m’a abordée ? Normalement, les jolies lycéennes comme moi ça fait frémir les restes de vieux débris comme toi non ? enfin lycéenne pas vraiment, j’suis dans une école privée un peu spéciale, mais on respecte les codes vestimentaires. M’enfin si ça te fait plaisir ma tenue, je te conseille…

Elle cherchait manifestement quelque chose dans son soutien-gorge. Une fois qu’elle eut trouvé ce qu’elle désirait, elle le tendit au vieux.

… d’aller voir à cette adresse. C’est là où j’bosse. J’suis hôtesse dans un club le soir. Vas y et demande Sae. On passera un bon moment ensemble. Mais te méprends pas hein, j’couche pas, moi. Mais on peut bien s’marrer. Je chante. Et toi ? T’aimes chanter ? C’est l’pied, deux verres et karaoké ! j’adore chanter, c’ma passion dans la vie quand j’ai l’temps, et j’ai rarement l’temps. Du coup j’fais du karaoké et on m’paye pour ça. C’est chouette ! ça répond à ta question ?


C'est pas mal tout ça. Mais tu ne m'as pas dit, de quel endroit es-tu originaire au juste ? As-tu déjà voyagé ? ●

Je sais qu’à ton âge, on a le cerveau mou, mais j’vais être une gentille fille, et te fournir des explications claires et concises. Ma famille est ici depuis plusieurs générations, c’est un cercle fermé comme je t’ai dit avant. Je suis née au Jappon, dans cette ville moisie pour une fille pleine de vie comme moi, et je l’ai jamais quittée. Sauf pour aller voir de la famille plus éloignée, et encore, c’est rare. Tu commences à comprendre ? J’suis destinée à croupir ici pour le reste de ma vie pour le bien de la famille, pour « l’imaaaage », qu’on reste dans les bonnes grâces du vieux. On est pas les héritiers directs du vioque mais on aimerait bien rester le plus proche possible, vous savez au cas où il n’y aurait pas d’héritier direct et qu’il faudrait choisir.
Tsch. ‘Fin  ça c’est les mots de ma mère, ça me dégoute. T’as eu ta réponse, passe à autre chose. A moins que tu en aies fini là.


De ce que je sais, aucun chef de bande n'accepte de mous du genou à bord. Donc, dis-moi, quel est ton métier, ta petite spécialité à toi ? A moins que tu ne travailles en solo ?! ●

Pour une raison encore inexpliquée, Sae explosa de rire. Un long rire sardonique, amer. Très amer. Elle en alerta ses molosses qui commencèrent à débouler, avant qu’elle ne les renvoie d’un signe de main. Elle essuya les larmes de ses yeux et répondit enfin.

Personne n’accepte de mous du genou ? Chez les Nishijima c’est la maison des mous des g’noux. La pègre trop propre, qui trempe dans aucun business illégal. Ah ça se veut de la mafia chez nous, et ça parle d’honneur, de traditions, mais y’en a aucun qui se mouille vraiment. Et je mens pas pour protéger ma famille hein, y’en a vraiment aucun qui est foutu de se mouiller.  On est la risée du milieu. « Diplomatie » Même les petites frappes se paient notre poire, sur notre propre territoire ! Et personne dans ma famille ne défend son honneur… Ni les siens…

Sae agrippa son bras droit en grimaçant.

J’ai honte de ma famille. J’suis encore jeune, j’ai pas encore ma place, mais j’apprends la gestion d’entreprise, l’économie, tout ce qui est RH. J’suis censée reprendre le flambeau d’ma mère. Les clubs d’hôtes. Enfin ça c’qu’elle veut m’imposer. Mais je suis pas d’accord. J’ai un projet plus ambitieux. J’vais redorer l’honneur des Nishijima et faire en sorte que chaque lascar de c’pays se chie dessus en entendant notre nom, au lieu de lui cracher dessus comme s’il ne représentait rien. L’Institution nous place comme les ennemis publics n°1, à ce rythme-là, quand ils vont débarquer avec leurs hunters, ma famille va juste se laisser passer les menottes et fermer sa gueule. J’en suis certaine, et ça m’vener de ouf. Lâches, tafioles. J’vais m’battre, j’vais les battre. La famille tombera pas si facilement tant que je serai vivante !


Beaucoup l'ignorent mais être un Hunter, par exemple, c'est avant tout une vie d'aventures et de rêves. Comptes-tu rejoindre l'Association, toi aussi ? Et avant toute chose, quel est ton rêve le plus cher ? ●

Sae cracha par terre.

M’parlez pas des hunters. Ce sont que les chiens de l’Institution. Faut être bigleux pour pas le voir. J’vous dis, ils vont débarquer et nous débusquer comme des lapins. Plutôt mourir que de rejoindre leur association. Être le toutou des politiciens, une vie de rêves ? C’est votre avis.
Mon rêve le plus cher ? Que ma famille règne sur le monde de la pègre, qu’elle soit respectée et crainte. Et que celui qui ose la défier meurt dans la plus grande souffrance. Nan même mieux, qu’il soit exposé presque mort à la vue de tous pour bien faire comprendre qui c’est les darons dans le game !  

Ses yeux étaient écarquillés et émettaient des éclairs de rage.


C'est... Tellement émouvant. Tu portes tant de promesses, c'est magnifique ! Mais, pour accomplir un tel objectif, tu vas devoir te battre d'une façon ou d'une autre, j'imagine ! Es-tu sûr(e) d'être à la hauteur ? Comment vas-tu faire pour vaincre ceux qui seront en travers de ta route ? ●

…. Ces mêmes yeux devinrent beaucoup plus calmes et aussi beaucoup plus noirs.

Tu t’paies ma frite c’est ça ? T’as envie de mourir non ? Ou tu te chies dessus. Tu commences à comprendre à qui tu as à faire. Ou t’es détraqué. Si ça te fait tant bander, je te laisserai l’honneur d’être le premier à exhiber tes boyaux à la face du monde.

Comment je compte faire ? C’est une question de tripes et de mental. Tant que les deux me lâcheront pas, j’irai au bout et j’atteindrai les sommets. Et ceux qui se mettront en travers de ma route…

Elle s’interrompit et posa son pouce sur sa gorge, avant de mimer un égorgement.

Comme tu le sais, ici et partout dans le monde, il existe de nombreux utilisateurs du Nen. Sais-tu déjà de quoi il s'agit ? Si oui, penses-tu le maîtriser en partie ou bien tu te reconnais toi-même comme étant débutant(e) ? Oh, et puis, quel est ton type naturel ?! ●

Sae devint beaucoup plus hésitante.

Un vieux rabougri comme toi connait le Nen ? Hmm attends… Nan j’sens rien qui émane de toi. Soit t’es un pro en Zetsu soit t’es tellement naze que t’arrives pas à le maitriser. En ce qui me concerne… J’suis encore débutante, dit-elle un peu abattue. Mon nen c’est de la transformation d’après Les vieux qui nous l’apprennent, et ils sont ultra exigeants. J’arrive pas à développer mon Hatsu. Je bloque, j’sais pas pourquoi, et j’me fais un peu gueuler dessus pour ça. J’fais de mon mieux, mais j’crois qu’ils pigent pas que c’est pas super encourageant de se faire sermonner quand on arrive pas.


Hm, je vois ! Mais, assez parlé de violence, tu devras certainement te battre bien assez tôt. A mon âge, on est presque aveugle tu sais. Décris-toi brièvement mon enfant, que je sache à quoi tu ressembles.  ●

Sur sa tempe, une veine devint beaucoup plus saillante alors qu’elle encaissait la question indiscrète, les yeux fermés.

Tu crois quoi ? J’avais capiche que tes mirettes marchaient mal, mais tu perds pas l’nord-ouest. J’savais qu’en bas, ça marchait très bien. Je t’ai grillé dès le départ mon gars. Mais comme t’as l’air d’être sourd en plus, je te répète c’que j’ai dit taleur, tu veux voir, tu viens au club, tu paies et après ça se négocie. Y’a un business qui tourne papy. J’expose pas mon corps de rêve au premier vieux croulant qui m’le demande. T’es bien du genre à toucher des miches dans l’métro toi, ça s’voit. Sinon, ce que tu vois là se suffit à lui-même pour savoir à quoi je ressemble.

D’un geste anodin, Sae flatta sa longue coiffure brune afin qu’elle vole brièvement au vent. Ses yeux d’un bleu glacial restaient fixés sur le vieux à l’affut du moindre geste suspect alors que sa fine bouche restait fermement close, cachant ses dents blanches parfaitement alignées. Son petit nez pointu renifla plusieurs fois tandis qu’elle s’accordait quelques instants de réflexion. Elle se demandait si pour attirer un nouveau client potentiel, elle devait se mettre un peu plus à nu. Verbalement. Sa respiration se calmait suite à son coup de sang quelques minutes auparavant, soulevant plus délicatement son buste garni. Sae était plutôt mince, ses épaules peu larges et ses bras plutôt fins. Le haut dénotait avec ses hanches et cuisses plus larges, qui eux contrastaient encore une fois avec des pieds pas si grands que ça. Finalement, elle finit par prendre une décision.

Ouais non, tu paies.

Tu m'as l'air plutôt bien bâti(e) ! Alors, résumons en cinq adjectifs, physiquement tu es... ●

Tu commences à être sacrément lourd à baver sur mon physique. T’es vachement superficiel comme gars. Pas que tu m’intéresse de base, mais les gars comme toi c’est les pires.

Elle consentit un effort tout de même. Elle avait devant elle un client potentiel.

Hmm… Alors je dirais comme ça, Jeune, Jolie, Brune, Attirante et… heu… comment le dire… Fournie ? wink

Bien, maintenant que je vois à quoi tu peux ressembler, j'aimerais savoir à quoi tu penses, mon grand/ma grande ! Refaisons le même exercice, en cinq adjectifs, comment pourrais-tu résumer ta personnalité ? ●

C’est quoi ces questions nulles, on dirait une embauche pour un boulot… il craint, pensa Sae.

On me reproche souvent d’être Impulsive, Bagarreuse, Têtue, Hautaine. J’suis juste Indépendante et ils veulent pas l’admettre.


Finalement, cinq mots, ce n'est pas assez. Procédons étape par étape, comment es-tu dans la vie de tous les jours ? ●

Faut que je te définisse les mots un par un aussi ? On risque d’en avoir pour un moment si j’dois jouer les dicos avec toi. Sauf que j’ai un job qui m’attend alors on va faire vite hein ?

Impulsive ça veut dire que….

Tandis que Sae expliquait les mots un par un à l’inconnu qui lui posait de trop nombreuses questions, non sans être hautaine par-dessus tout, laissez-moi vous expliquer brièvement ce qu’est Sae.

Sae c’est le genre d’adolescente pour qui tout part sur un coup de tête. Comme la gamine qu’elle est, Sae jouit d’une fragile base sur ce qu’est la vie comportant ce qu’elle entend, les on-dit, sa maigre expérience dans la vie et enfin à son imagination qui vient colmater les trous. Le tout donne une idée assez idéaliste et biaisée de ce qu’est la réalité des choses. Ses rêves, Ses ambitions, ses plans « sans faille », tout est encore pure fantasme. Couplons à ceci à un égo fier, parfois vaniteux, inhérent à sa condition de fille de bonne famille, il est difficile de lui faire entendre raison, et encore moins une fois qu’elle a pété sa durite. Et il n’est vraiment pas difficile de la faire sortir de ses gonds. Sanguine et agressive quand elle se sent en danger ou quand elle est blessée, elle a tendance à se laisser aveugler par la colère et la douleur au détriment de ses capacités de réflexion. Et à foncer tête baissée, quitte à se mettre en danger.
Mais ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Elle n’est pas bête ou stupide. Au contraire, lorsqu’elle est relativement calme, Sae est capable de réfléchir et d’utiliser habilement ses atouts quand la situation le permet.

Sae est simplement une gamine couvée trop précieusement qui se retrouve paumée aujourd’hui face à une réalité qu’elle ne comprend pas encore. Une âme perdue qui s’ignore ne demandant que guidance, mais qui ne sait pas l’accepter par une volonté un poil trop forte de vouloir faire les choses par elle-même.

D'accord, j'ai compris. Et quand tu fais face à une difficulté, généralement, comment réagis-tu ? ●

La difficulté j’lui met un pied bouche bien senti, et y’en a plus. Faut pas fuir, mais la confronter.


Très bien ça, je commence à te cerner un peu plus. Un dernier point cependant, comment te comportes-tu lorsque tu dois te battre ? ●

Sae sourit quelque peu, dévoilant ses incisives.

J’donne tout. J’suis une furie, je laisse pas de répit pour mes adversaires. J’connais un peu des techniques d’arts martiaux, au cas où j’dois me défendre ou ruser, mais sinon j’attaque. Je beigne, je griffe, je mords, je latte. Y’a pas une partie de mon corps qui sert pas à foutre la misère à mon adversaire. Et si j’prends un coup, j’y retourne. Jusqu’à ce que y’en ai un au tapis.


Voilà qui me permet de mieux te comprendre. Toutefois, j'aimerais savoir comment tu en es arrivé(e) là. Est-ce que tu peux me raconter ton enfance, comment était ta vie jusqu'à aujourd'hui ? ●

Qu’est-ce que tu cherches au juste gars. A m’foutre furax ? Si c’est l’cas dis le de suite, t’as tiré le bon ticket pour le paradis ! Avec tout ce que je t’ai dit avant, t’as pas compris à quel point ma vie c’était de la merde ? Ouvre bien tes esgourdes, y’aura pas de deuxième fois.

Ma famille c’est de la grosse merde, je déteste ma mère c’une pu…

Hola, on va arrêter les frais ici, j’aimerais quand même que le récit soit plus objectif. Et l’objectivité, ce n’est pas le fort de Sae. Je pense que nous avons tous compris que Sae a un différent avec sa famille, et il est grand temps d’expliquer le pourquoi du comment sans être obligé de subir son parler… cru.
Sae est née et a grandi au sein du clan mafieux Nishijima. Une famille bien ancrée dans l’économie du Jappon et relativement intègre qui ne touchait pas ou très peu aux business de l’ombre, ou illicites. Les enfants Nishijima étaient coupés du monde, réunis dans le seul domaine familial sur une île paumée au large du Jappon où la famille se chargeait de leur entière éducation. Si leur éduction était quasiment identique aux autres enfants, elle contenait quelques disparités, notamment en ce qui concernait l’histoire. Cette dernière était bien plus centrée sur l’histoire du Clan Nishijima que celle du Jappon ou du monde. A partir de 10 ans, des enseignements spécialisés séparaient garçons et filles. Les garçons étaient instruits de l’art du pugilat tandis que les filles apprenaient l’économie et les rudiments de la tenue de maison, avec tout le traditionalisme Nipopon. Le tout dans un cadre très stricte typiquement Yakuza. Sae grandit dans cet environnement-là, aînée d’une fratrie de trois, une petite sœur qui la suivait de deux ans et un petit frère qui la suivait de 9 ans. Elle était très proche de ses cousins de la famille héritière du chef de clan. Notamment un qui avait son âge et qui partageait un caractère disons casse-cou. C’est lui qui lui apprit les rudiments de la baston, principalement en lui ayant cogné dessus. Elle apprit à rendre les coups, le tout dans une entente et un respect mutuel, elle adorait la bagarre et se voyait déjà conquérante à frapper des gredins des rues, au grand dam des adultes, surtout des parents. Son cousin était vu comme le gamin à problème et la mère de Sae, très stricte, ne voyais pas du tout ce qu’elle jugeait comme la décadence de sa fille d’un bon œil. Sa fille aînée était censée suivre ses traces dans la direction de clubs d’hôtes n’était déjà pas la plus diligente du clan, mais en plus elle suivait le pire enfant que la famille eut à supporter en ce temps. Heureusement pour elle, le cousin problématique fut écarté de la famille durant sa douzième année, et elle en profita pour reprendre implacablement l’éducation de sa fille, afin d’en faire une bonne ménagère et une gestionnaire hors pair de ses activités. Et s’il fallait mettre des coups de ceinture, elle en mettait. Il ne va pas sans dire que leur relation déjà pas terrible, Sae déjà rebelle jusque lors, se dégrada encore plus, au point que Sae finisse par haïr ouvertement sa mère, et réciproquement. Sae, sans perdre son côté tempétueux et sans réel support de quatre-cents coups, finit malgré elle par rentrer dans le moule. Elle visitait le plus souvent possible sa petite cousine rendue catatonique par le sort subit par le cousin écarté mais passait son temps entre l’école et le travail d’hôtesse imposé par sa mère. Grosso modo, de six heure le matin à minuit, ses journées étaient quasiment chargées. Sae étaient une hôtesse appréciée par les clients, mais sa mère, probablement génétiquement mélangée avec une vipère, ne cessait de l’accabler de reproches et lui demandait toujours plus d’efforts. Si elle en avait le pouvoir, sa mère aurait transformé sa fille en poupée parfaite capable d’exaucer ses souhaits. Mais une personne aussi maniaque que sa mère ne peut que suivre les règles du clan, l’aîné est héritier, sauf bannissement du clan. Elle devait donc faire avec.

Sae de son côté, en plus de sa mère s’écarta encore plus du clan l’an passé. Alors qu’elle jouissait d’un rare moment de temps libre, elle en avait profité pour aller faire quelques boutiques. Elle surprit alors une conversation entre plusieurs individus, au coin d’une rue. Une conversation qui dénigrait sa famille, qui la trait de poule mouillée, qui n’était pas digne de la pègre. Comment une famille pouvait elle se prétendre mafieuse si elle ne trempait dans aucun trafic louche ? La famille mettait un point d’honneur à être clean et à vivre de ses business sans risquer de se faire poursuivre par la justice. Finalement, c’était juste une entreprise, et rien d’autre. Rien de bien méchant, pas de quoi inquiéter le monde. Des lopettes quoi. Sae abattit son sac sur la tête d’un des individus, blessée dans son honneur et celui de sa famille. Ces petites frappent ne connaissaient rien à rien, et elle allait leur montrer ce qui signifiait d’appartenir au Clan Nishijima.
Ce soir-là, lorsqu’elle rentra à la maison couverte de contusion et de sang, les vêtements déchirés, en ne s’étant pas présentée au club. L’ambiance fut électrique. Il ne va pas sans dire que la ceinture de la mère vint trouver un dos déjà bien blessé, sans chercher à comprendre ce qu’il s’était passé. Le lendemain, Sae fut reçue par le patriarche du clan. Elle put enfin s’exprimer sur ce qu’il s’était passé. Néanmoins, le Patriarche, lui si prompt à la violence, prit la nouvelle à la légère. Il ne s’agissait que de voyous qui ne comprenaient rien à rien. Il ne comptait pas envoyer quelqu’un punir les agresseurs, ni laver l’honneur du clan. Sae en ressortit à la fois doublement blessée et trahie à la fois. Les paroles de ses agresseurs se répétaient dans sa tête, encore et encore. En effet, sa famille était une famille de lopettes. Ni crainte, ni respectée. Pour la fille qui malgré tout, était fière d’appartenir à la pègre, elle sentit quelque chose se briser en elle. Qu’allait elle conquérir avec sa famille si on tranait son nom dans la boue sans broncher ? Où était la gloire de sa famille ?  C’est finalement quelque chose qu’elle partirait chercher par elle-même. Elle voulait laver le nom des Nishijima, son nom à elle, son honneur. Aujourd’hui, à dix-sept ans, elle n’avait qu’une chose en tête, assoir la domination des Nishijima au sein de la pègre et à tous les niveaux. Quitte à plonger dans des trafics illicites, à découvrir le monde underground, quitte à trahir sa famille, qui l’avait elle-même trahie. Ne seraient-ils pas quitte au final ? Elle servait l’intérêt de la famille. Sa folle croisade commencerait bientôt.

Ils seront reconnaissants, assura Sae en face de son interlocuteur en guise de conclusion.


J'aimerais aussi que tu me racontes le meilleur souvenir de bataille que tu aies vécu s'il te plait. Bon après, si tu ne t'es jamais battu(e) auparavant.. Un autre souvenir mémorable fera l'affaire ! ●

C’est quand j’ai tapé ces connards. Ils étaient quatre. J’en ai sonné un assez vite en m’acharnant sur sa tête avec mon sac. Et les autres se sont rué sur ma gueule. J’m’étais jamais battue comme ça avant. J’me suis même plus débattue que battue. Mais j’suis certaine de leur en avoir mis plein leur tronche. J’te l’ai dit, j’suis une furie. J’ai beau m’être fait marrave, je me battais pour quelque chose. C’était pas de l’entrainement là. J’me suis fait péter le bras ! J’me souviendrai toujours de cette baston. Du gout du sang dans la bouche, du gout infect de la peau d’un ces abrutis. Des os qui craquent sous les coups. T’sais le temps est au ralenti. Enfin c’est dur de t’expliquer comme ça… Tu aimes ou tu aimes pas taper. Moi j’aime bien. Même si j’ai perdu et que j’ai vomi du sang dans les poubelles à côté après, je leur ai mis trop cher.

Elle sourit avant de lever les yeux au ciel, évasivement.

J’crois que j’ai même dû en castrer un. En tout cas il a couiné sévère quand mon genou lui a latté les c-


Aaaaaah, ça c'est cool ! Ah que oui ! Allez va, je vais te laisser tranquille. Tu as déjà perdu assez de temps à parler avec un vieil homme comme moi. Va mon petit/ma petite, c'est à toi de conquérir le monde ! ●

Tu m’as coupé là où j’rêve ? Tu crois pas si bien dire en tout cas, on en reparlera dans quelques années, si t’es encore en vie.

Elle claqua des doigts deux fois, les deux gorilles vinrent à ses côtés presque immédiatement.

Pétez-moi sa caméra. Et cognez le bien fort, avec un peu de chance, quand il se réveillera dans une poubelle, il se souviendra plus de son après-midi. Bye-bye vieux, c’était sympa de parler. Maintenant, c’est l’heure du dodo!

Sae tourna les talons et quitta la rue comme une princesse, alors qu’elle laissait le vieil homme à son sort, se faire tabasser par deux pitbulls deux fois plus grands et larges que lui.